C'est un des plus beaux parcs d'Afrique centrale, composé d'une mosaïque de milieux divers - forêt, savane, mangrove, marais - et peuplé de nombreux grands mammifères. Loango est sans doute le seul lieu au monde où l'on peut voir des éléphants arpenter la plage et des hippopotames se baigner dans l'océan. C'est aussi un des rares endroits où l'on peut étudier en même temps gorilles et chimpanzés, comme le fait une équipe du Max Planck Institute.
Depuis plusieurs mois, le parc gabonais de Loango, au sud de Port-Gentil, ne vibre plus des trilles des oiseaux à l'aurore, mais des explosions de dynamite provoquées par une campagne de recherche de pétrole dans une zone couvrant quasi intégralement ses 1 500 km2.
Tout est parti de la visite au Gabon du président chinois, Hu Jintao, en février 2004, bientôt suivie, en septembre 2005, d'un permis d'exploration accordé à Sinopec, la deuxième compagnie pétrolière chinoise. Plus de 150 ressortissants de ce pays sont arrivés peu après dans le parc, où ils ont commencé à préparer une série de 16 000 explosions de dynamite. Une étude d'impact sur l'environnement a été réalisée. Elle a été rejetée par le ministère de l'environnement en juillet, ce qui n'a pas empêché Sinopec d'installer deux nouveaux villages, de continuer à ouvrir des routes dans la forêt et à déclencher des explosions, y compris dans la lagune, où vivent des lamantins, une espèce de mammifère marin rare.
En plus des dégâts écologiques qu'elle provoque, ne serait-ce que sur les animaux, l'exploration pétrolière met à mal le projet d'écotourisme développé sur le parc. Plus généralement, elle altère l'image écologique que veut se donner le Gabon depuis que, en 2002, le président Omar Bongo a décidé de réserver 10 % du territoire national à la conservation de la nature en créant treize parcs, dont Loango est le fleuron.
Les ONG de protection de la nature ont vivement protesté. Le ministère de l'environnement s'est élevé contre les agissements de Sinopec, tandis que le Conseil national des parcs naturels sommait, en septembre, la compagnie chinoise d'interrompre ses activités. Les bailleurs de fonds ont écrit au ministre de l'économie forestière pour s'inquiéter de la situation. Mais le ministère des mines a pesé dans l'autre sens et, le 12 octobre, le conseil des ministres tranchait en faveur de la poursuite de l'exploitation : "Si une richesse minière ou pétrolière est découverte dans une aire protégée, cette richesse peut et doit être exploitée afin de favoriser l'essor économique et social du pays", indique le communiqué du gouvernement. Ce dernier a cependant demandé à Sinopec de ne pas procéder à de nouvelles explosions avant d'avoir fait réaliser une nouvelle étude d'impact. La compagnie peut néanmoins déclencher les mines déjà enterrées, ce qui devrait être fait dès cette semaine.
L'affaire met en lumière la difficulté de concilier conservation de la nature et enjeux économiques. "On peut passer d'une économie de rente basée sur le pétrole à une économie touristique durable, mais il faut du temps", estime Joseph Moulombi, de l'association Croissance saine environnement.
Le cas de Loango n'est pas isolé : deux projets d'oléoducs menacent de traverser les parcs de Mayumba et de Pangara, une concession minière est demandée dans le parc des monts de Cristal et une immense mine de fer pourrait s'ouvrir à Belinga, dans le nord-est du pays, à côté du parc de Minkebe. Chinois mais aussi Sud-Africains et Européens sont impliqués dans ces différents projets.
Hervé Kempf
Depuis plusieurs mois, le parc gabonais de Loango, au sud de Port-Gentil, ne vibre plus des trilles des oiseaux à l'aurore, mais des explosions de dynamite provoquées par une campagne de recherche de pétrole dans une zone couvrant quasi intégralement ses 1 500 km2.
Tout est parti de la visite au Gabon du président chinois, Hu Jintao, en février 2004, bientôt suivie, en septembre 2005, d'un permis d'exploration accordé à Sinopec, la deuxième compagnie pétrolière chinoise. Plus de 150 ressortissants de ce pays sont arrivés peu après dans le parc, où ils ont commencé à préparer une série de 16 000 explosions de dynamite. Une étude d'impact sur l'environnement a été réalisée. Elle a été rejetée par le ministère de l'environnement en juillet, ce qui n'a pas empêché Sinopec d'installer deux nouveaux villages, de continuer à ouvrir des routes dans la forêt et à déclencher des explosions, y compris dans la lagune, où vivent des lamantins, une espèce de mammifère marin rare.
En plus des dégâts écologiques qu'elle provoque, ne serait-ce que sur les animaux, l'exploration pétrolière met à mal le projet d'écotourisme développé sur le parc. Plus généralement, elle altère l'image écologique que veut se donner le Gabon depuis que, en 2002, le président Omar Bongo a décidé de réserver 10 % du territoire national à la conservation de la nature en créant treize parcs, dont Loango est le fleuron.
Les ONG de protection de la nature ont vivement protesté. Le ministère de l'environnement s'est élevé contre les agissements de Sinopec, tandis que le Conseil national des parcs naturels sommait, en septembre, la compagnie chinoise d'interrompre ses activités. Les bailleurs de fonds ont écrit au ministre de l'économie forestière pour s'inquiéter de la situation. Mais le ministère des mines a pesé dans l'autre sens et, le 12 octobre, le conseil des ministres tranchait en faveur de la poursuite de l'exploitation : "Si une richesse minière ou pétrolière est découverte dans une aire protégée, cette richesse peut et doit être exploitée afin de favoriser l'essor économique et social du pays", indique le communiqué du gouvernement. Ce dernier a cependant demandé à Sinopec de ne pas procéder à de nouvelles explosions avant d'avoir fait réaliser une nouvelle étude d'impact. La compagnie peut néanmoins déclencher les mines déjà enterrées, ce qui devrait être fait dès cette semaine.
L'affaire met en lumière la difficulté de concilier conservation de la nature et enjeux économiques. "On peut passer d'une économie de rente basée sur le pétrole à une économie touristique durable, mais il faut du temps", estime Joseph Moulombi, de l'association Croissance saine environnement.
Le cas de Loango n'est pas isolé : deux projets d'oléoducs menacent de traverser les parcs de Mayumba et de Pangara, une concession minière est demandée dans le parc des monts de Cristal et une immense mine de fer pourrait s'ouvrir à Belinga, dans le nord-est du pays, à côté du parc de Minkebe. Chinois mais aussi Sud-Africains et Européens sont impliqués dans ces différents projets.
Hervé Kempf
Source: Le Monde
No comments:
Post a Comment